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Piste - 14-10 - El Kelaa N'Gouma / Zagora
Encore une sacrée journée. Avec un brin d'inquiétude avant même le départ. L'orage a grondé toute la nuit et il a beaucoup plu. De grosses pluies d'orage, bien lourdes. La route en porte les stigmates et le ciel est encore bien noir pour augurer le meilleur. Nous décidons malgré tout de maintenir l'étape. Après tout, l'aventure, c'est l'aventure ! Le premier groupe, les verts, partent dès 7h du matin pour retrouver la piste à près de 30 km d'El Kelaa. L'embranchement n'est pas évident à trouver, mais Jean-Claude Gillonier, désormais surnommé le Marabout à cause de ses dons d'imposition des mains sur les moteurs, engage ses troupes sans mollir sur ce tronçon. Pourtant, derrière, ça commence déjà à peiner. La Jeep d'Aimé est à la traîne. « Je voudrais vous y voir, qu'il grogne à la CB. Il fait froid et c'est une Willys dont la conception remonte à l'âge de pierre. Je peine à dépasser le 50 km/h sur cette route. » Du coup, ça prend de l'avance devant et le Marabout doit organiser un point de rassemblement pour attendre ses ouailles. Les Bleus, partis pourtant trente minutes plus tard, en profitent pour les dépasser. Nous, avec la Gégémobile, nous sommes loin devant et nous avons entraîné dans notre sillage la 403 plateau, la Rodéo des Auvolat et la R4 de Flavien Charbonnier et Jean-Christophe Toutblanc. Ils parviennent à nous suivre sans problème dans la première partie, très roulante. Avant de peiner dans les premiers hectomètres qui grimpent. La piste de terre est défoncée, creusée par d'importantes ornières ou simplement moutonneuse. On se fait rapidement chahuter et le rythme tombe d'un coup. Dans les CB, ça se prévient sauvagement, et il en est un, àl'arrière, qui doit commencer à s'inquiéter. C'est Dominique Kaus, dont le Toy a perdu son bouchon d'essence dans le col du Tizi n'Tichka. Il roule depuis hier avec un bouchon improvisé avec on ne sait pas trop quoi. Il en perd bien un peu de temps à autre, et il attendra Zagora pour en trouver un.
Nous laissons passer les groupes Vert et Bleu et voyons au loin les camions Mercedes et les premiers 4x4 pour entreprendre une remontée à la Gégé. La piste change, devient caillouteuse alors qu'elle grimpe à plus de 2.000 m. Du caillou beaucoup plus tranchant que la veille, carrément coupant même. Il faut avancer avec prudence et certains plus que d'autres. Le Buggy avance ainsi à deux à l'heure, pour ne pas exploser son fond. Il faut dire que sa hauteur sous caisse frise le ridicule. « J'ai quand même touché quatre fois », soupirera Guy à la fin de la journée. La grosse surprise vient des Renault 4 et de la 404 qui semblent parfaitement faites pour ce genre de terrains. Elles gigotent, brinquebalent, dodelinent de l'arrière, plongent de l'avant, viennent planter leurs roues pour dessiner d'improbables figures, en équilibre plus qu'instable, au point qu'on les a surnommées les « Bolchoï ». Comme elles roulent ensemble, vous imaginez le ballet.
En arrivant en haut du col, au café Tizit, Christine Margueritat a failli faire une folie : embarquer un magnifique petit chiot, pas sauvage pour deux sous, que nous avions installé sur sa capote. Mais lui faire franchir la douane aurait été trop compliqué. Ce sont ses filles, Diane et Louise, qui vont être déçues. La journée de la 2 CV n'a pas été de tout repos, parce qu'elle a crevé à l'AV gauche. « C'est notre faute, reconnaît Christine, nous avions une crevaison lente sur cette roue depuis deux jours. La bombe anti-crevaison n'y faisait plus rien. Et sur une telle piste, ça ne pardonne pas. » Des crevaisons, il va y en avoir pas mal aujourd'hui. La Rodéo de nos Bretons préférés qui vivent au rythme d'une histoire par jour (à la crevaison, s'est ajouté un écrou dévissé sur le tirant ressoudé la veille. Ils cumulent les gars, on va finir par leur donner l'étiquette enviée du Chat Noir), la Rodéo de Jean-Claude Deparrois (qui, en prime, a arraché la fixation de son pont AR, réparée ce soir au garage local dans lequel Daniel doit avoir des actions...), Et la Ténéré de notre motard préféré qui avait commencé par louper l'entrée de la piste, avant de crever. Il roulait derrière leToy des Kaus et le Land des Viet lorsqu'il a dû faire un écart pour quitter leur poussière. Mais dans la manœuvre, il a heurté une pierre coupante qui a entamé le flanc d'un pneu. Crevaison. « Dominique et Gilles se sont immédiatement arrêtés, et nous avons démonté le pneu. J'avais acheté, avant de partir, un super kit de réparation, mais la colle ne... collait pas. Est alors arrivé une mobylette qui s'est arrêtée. J'ai demandé au gars s'il avait, par hasard de la colle. Il m'a sorti un tube et en deux secondes, c'était réparé. Et en arrivant à Zagora, je suis allé acheter la même colle. Le vendeur a été tout surpris parce que je lui ai immédiatement donné 3 dirhams. Le gars qui m'avait dépanné m'avait dit que ça ne valait pas plus... »
Il va falloir plus de trois heures pour accomplir les 85 km de cette première partie de l'étape du jour (certains plus de 4 !). Le goudron est une véritable bouffée d'oxygène pour tout le monde. Et l'on profite du premier arbre pour déjeuner. Il est déjà une heure de l'après-midi, Certains décident de ne pas continuer par la deuxième piste prévue, mais de filer directement sur Zagora. « Ca nous a bien suffi. C'était grandiose, on est épuisés. » Les Moumoune, l'Aro des Dubiez, le proto de Lucas (il a des soucis de pont, la vidange d'hier soir a laissé apparaître des traces de limaille, et il veut le faire contrôler chez Momo à Zagora), toutes les Renault 4, la 404, la 504 Daktari, les deux Wrangler, la 403 et le Toyota jaune et rouge (les électrons libres comme les a surnommés Daniel) et les camions Mercedes.
Cette deuxième partie est longue de 75 km. Elle est roulante, mêle cailloux, terre, sable et, sur le dernier tiers, un terrain plat et sur lequel on peut tracer dans le moindre souci. En faisant cependant attention parce que des creux traîtres se jettent parfois sous nos roues. Nous traversons quelques oueds empierrés, ou sablonneux. Et c'est là que le club R4-R6 au grand complet va nous offrir le gag de la journée : un ensablage aux petits oignons. La Rodéo de Didier Auvolat, celle de Rémi Ducourneau et la R4 de Flavien Charbonnier. Bravo les gars ! Ca promet pour demain, pas vrai ? Mais, prétend Didier, c'était juste pour faire une photo pour le bulletin du club. Tu parles qu'on va te croire. D'autant que tu ne t'es pas vanté de ton ultime exploit de la journée. Parce qu'une fois désensablés, nos trois compères sont repartis pied au plancher. Mais Didier (qui n'avait pas oublié son épouse ce coup-ci) avait laissé son frein à main serré. Quelques kilomètres plus loin, plus de fein à la pédale ! « Et pour ne rien arranger, nos copains étaient loin devant, nous étions perdus... Pas de GPS... Mais lorsque je m'en suis rendu compte (à l'odeur), je les ai laissés refroidir et nous avons réussi à rentrer à Zagora. Et j'ai fait contrôler mes freins en arrivant... »
Ca bricole pas mal ce soir d'ailleurs. Essentiellement de la bobologie car malgré les difficultés du parcours, tout le monde a été prudent, ménageant sa mécanique. Le garage Momo passe donc d'une auto à l'autre, sans s'affoler, une armée de mécanos (prévus depuis longtemps) s'escrimant autour de toutes les voitures en attente ici d'une soudure, là de nouveaux amortisseurs, là de roulements de pont... Sur le parking de l'hôtel, l'assistance a sorti les chalumeaux et les outils pour aider les concurrents. Le nombre de capots ouverts est impressionant, mais aucun affollement. C'est juste de l'entretien ! « C'est pas grave » comme dirait le toubib qui, de son côté, ne chôme pas non plus, la turista ayant élu domicile au sein du groupe...
Tiens, vous voulez le dernier gag de la journée ? C'est Yvette qui nous le raconte. La Rodéo est équipée d'un réservoir supplémentaire, derrière le siège AV. « Lorsqu'on fait le plein, il y a toujours un filet d'essence qui coule. Comme chiffon, nous nous servons d'un vieux slip troué de Didier. Ce soir, lorsque nous avons fait le plein, le gars de la station-service a absolument son slip. Mais Didier ne voulait pas. Il y tient ! » Et tenez-vous bien, le gars s'est vexé et il les a traités de... Bidochon. En rigolant et en ajoutant que « c'était le seul truc des Français qu'il avait retenu ! » Du coup, Didier l'a échangé contre un vieux chifffon...

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