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Etape 07 - PLATAMONOS / HORTO
Quel programme ! Ce qu'il y a de bien avec nos rallyes, c'est que les imprévus se transforment toujours en belles histoires. Pourtant, sur le papier, l'étape du jour devait être récréative. Une descente rapide sur Larissa puis Volos, avant d'entamer la montée vers Portaria pour pénétrer dans le Pélion, et découvrir la magie de ses paysages, entre deux mers. Une sorte de Périgord noir mâtiné de quelques inserts bretons tout droit sortis de la forêt de Houelgouat. La route est sinueuse, elle monte, elle descend et met à rude épreuve les freins de nos anciennes. C'est pourtant une Mercedes plutôt jeune qui, hier, a connu des problèmes de liquide monté en ébullition. Même si l'AMG 500 a une boîte auto, ce n'était quand même pas très normal. Mais après la purge de ce matin, tout va bien et Alain Sevrin est venu remercier l'assistance dès son arrivée. « Elle n'a jamais été aussi bien réglée ! » assuret-il.
Le Pélion c'est, dit-on, le pays des Centaures. C'est, en tout cas, une région où il fait manifestement bon vivre. On affirme ici (ce n'est pas nous qui le disons mais Marie-France, une Française installée ici depuis 30 ans) qu'il fait toujours moins chaud que partout ailleurs en Grèce. Soit. Ce doit alors être l'enfer du côté d'Athènes car nous avons plus de 30 °C à l'ombre, et la grande majorité des participants profite de la piscine pour se rafraîchir. D'autres, par contre, ont du pain sur la planche. C'est le gros imprévu de la journée. Un nouveau joint de culasse, le deuxième du rallye.
Tout a commencé il y a... un an, grosso modo. La Mercedes 280CE de Gérard Leclère a commencé à rechigner à démarrer le matin, partant sur quatre cylindres, au mieux six, avant de retrouver de l'allant une fois bien montée en température. Pas très normal s'est-il fort justement dit. Il a donc confié son automobile à Mercedes. Des professionnels donc. Qui n'ont rien trouvé, mettant sur l'âge de la voiture (pourquoi pas) et du conducteur (c'est désobligeant) cette difficulté à se mettre en route. Gérard a donc récupéré son auto et fait avec ce caprice. Il a cependant hésité à venir avec en Grèce, mais devant l'insistance de Brigitte (son épouse), il a donc délaissé sa 402 fétiche pour rouler en Allemande. Plus confortable, plus puissante, en un mot plus moderne. Depuis le début du rallye, pourtant, il est grognon. Les caprices de son Allemande commencent sérieusement à l'agacer. Or, ce matin, cerise sur le gâteau, elle a carrément refusé de démarrer. Nein, qu'elle a fait. Je reste ici, et toi qui n'arrêtes pas de me comparer avec ta vieille 402, tu te dém... pour rentrer. Gérard n'est pas homme à se laisser intimider, tout guttural et péremptoire qu'ait été le ton employé par sa Mercos. « Ich bin dein patron, du doigts m'obéir » lui a-t-il répliqué, mordant avec vigueur dans sa pipe. Mais l'Allemande est têtue, et devant son refus réitéré, Gérard a demandé l'aide de l'assistance. Une aide musclée. Camille et Philippe, rien de moins. Qui, dès le départ, ont utilisé la manière forte. Démontant les bougies pour voir dans quel état elles étaient puis, inquiets par ce qu'ils découvrent, s'interrogent du regard avant de décider de débrancher la bobine et de lancer le démarreur. Bougie du deuxième cylindre enlevée, c'est un véritable geyser d'eau qui est sorti ! « Joint de culasse, mon pauvre », a fait Camille. Le deuxième en une semaine. Argh.
Je vous passe les onomatopées qui sont alors sorties de la bouche de Gérard. Mais il faut savoir son sang-froid garder et en grand ordonnateur qu'il est, Daniel a décidé qu'il était urgent de réfléchir avant de prendre une décision. Brûler immédiatement la Mercedes n'étant pas une option réaliste (on ne va pas quand même gâcher une allumette pour si peu !), on se dit qu'il est envisageable de changer le joint de culasse, à condition d'en trouver un, ça va de soi. L'opération commando est enclenchée à 10h15. La Mercos est montée sur le plateau de Pascal et Michel, Gérard prend place dans la 403 de Daniel, et la remorque pilotée par Camille et Philippe suit. Direction Larissa, à 60 km de là, pour trouver une concession Mercedes. Sur place, le brave magasinier tente de comprendre le problème, secoue la tête de haut en bas en disant « ochi, ochi » ce qui veut dire non. Gentil, mais pas trop décidé à s'intéresser à la question. Une jeune fille se mêle de la conversation, mais malgré son parfait anglais, ça ne change rien à l'affaire. Il n'est pas possible de commander un joint de culasse pour une aussi vieille auto. Ah ? On nous avait pourtant dit que Larissa était la capitale automobile de la Grèce, le paradis pour des collectionneurs comme nous. Peut-être mais pas chez Mercedes. Bon, tant pis. Il y a d'autres magasins, l'équipe va tous se les faire. Et puis, le miracle. Un homme entre dans la concession, et demande dans un excellent français : « A qui elle est la 403 ? » Daniel se retourne et se trouve face à Dimitri. Il ne sait pas encore qu'il a en face de lui un homme d'affaires influent, marié à une Française, et collectionneur lui-même. Qui plus est, en avisant les décos, il a repéré le logo Gazoline, revue qu'il lit régulièrement. Magnifique ? Oui, parce que vous avez voir comment s'organise la suite des événements. Il entraîne notre groupe hors de la concession et explique qu'il est à la bourre, mais qu'il va tout de même les accompagner pour les aider à trouver le joint de culasse. Il connaît manifestement tout le monde dans la ville, et toutes les bonnes adresses. Des marchands de pièces détachées, il y en a des centaines. Plus ou moins spécialisés. Y compris dans le joint de culasse. Oui, mes amis, un magasin qui ne fait que ça ou presque. Il en a des milliers, pour tous les modèles, toutes les époques. Tous rangés. En quelques secondes, le gars sort une pochette pour une Mercedes 230. Flûte, raté. « Pas de problème, dit-il, je vais vous trouver ça. Donnez-moi juste le type moteur ». Dix secondes plus tard, il décroche son téléphone, baragouine en grec (sans doute, nous ne maîtrisons pas assez la langue pour en être certains) et annonce, tout triomphant, qu'il en a trouvé un. Il arrive par le bus de 15h30 de Thessalonique. Il ne reste plus qu'à attendre...
Et comme décidément la journée sera pleine d'imprévus, notre petit groupe entreprend de pique-niquer sur le bord de la route, près de l'aéroport, à l'endroit très précis où les Jaguar de l'armée grecque font leur point fixe. Bonjour le décor ! Mais, croyez-le si vous le voulez, Dimitri les a rejoints avec des brochettes et des frites, avant de les emmener dans le bar d'un de ses neveux pour attendre l'heure fatidique. Au passage, il leur a fait voir sa dernière acquisition, une Jeep américaine qui a fait la guerre de Corée et a été parfaitement restaurée... La Grèce est un pays délcieux !
Le plateau et la remorque sont ensuite partis, direction le terminus de l'étape pour commencer à déculasser (pas triste cette opération, soit dit en passant), et le joint de culasse est arrivé à l'heure dite. C'est le bon ! Si ça n'est pas de l'efficacité optimum, ça y ressemble férocement, non ? A l'heure où je vous écris, le déculassage est terminé. Il aura fallu près de deux heures à Pascal, Camille et Philippe pour en venir à bout. Le problème, c'est qu'il n'y a pas que le joint qui soit défectueux. Ce moteur est en très mauvais état. Et le tendeur de chaîne inférieur est carrément cassé (le gros patin). Il va donc falloir commander la pièce (c'est en cours), se colleter une distribution, avant un reculassage. Si tout va bien, l'auto repart demain en début d'après-midi. Au pire, elle se termine demain soir après avoir voyagé sur plateau.

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