Etape 06 - KALAMPAKA / PLATAMONOS
L'étape du jour était à géométrie variable. Ceux qui n'avaient pas eu le temps de visiter les Météores pouvaient le faire et emprunter la voie de traverse qui économisait deux bonnes heures de route. Les autres filaient sur Kozani et le nord de la Grèce pour y découvrir d'incroyables lacs couleur bleu laiteux et les cigognes qui nichent en colonie dans toute la région, squattant les poteaux électriques. Le temps est, comme depuis le début, somptueux. Inondant les paysages d'une lumière chaude qui sublime toutes les couleurs de cette fin de printemps. Les champs sont d'un vert profond, ou d'un rouge tout aussi fort, les coquelicots poussant à profusion, le ciel est d'un bleu immaculé, les montagnes encore enneigées, les arbres en fleurs. Dans cette symphonie de couleurs, les moutons et vaches sont quasiment les seuls à partager la route avec nous. Peu ou pas de circulation, juste des troupeaux qui traversent, tranquillement, sans se presser, accompagnés par des chiens qui tiennent absolument à nous faire rentrer dans le rang, tous crocs dehors. De vrais gardiens qui ne vous lachent pas d'une semelle, et prennent vos pneus pour de la chair tendre. Ils barrent la route, vous crient dessus et lorsque vous vous arrêtez, ils vous indiquent la direction à prendre. Pas question de discuter. Les ordres aboyés sont clairs. Suivez la troupe, nom d'un clébard... Alors on joue avec eux, on avance, on recule, on joue l'intimidation. Eux aussi et il faut souvent l'intervention du berger pour qu'enfin ils arrêtent de nous confondre avec un mouton. Nous rendent chèvres les bougres !
La route serpente, grimpe, redescend. Nous traversons des paysages magnifiques, salués par des autochtones tout étonnés de voir d'aussi vieilles autos. Ici, pour rajeunir le parc automobile, on n'y a pas été par quatre chemins, on a taxé. Plus le véhicule est âgé, plus vous payez. Radical comme traitement. Les anciennes sont rarissimes. Alors, nous faisons figure d'extraterrestes, d'envahisseurs sympathiques et on veut à tout prix nous payer un verre d'Ouzo, nous raconter des souvenirs, parler avec ces Français venus avec leurs antiquités visiter leur pays. Bon, il faut avouer que notre Président fait, ici, les gros titres. Ils lui ont trouvé un surnom. Ils l'appellent Carlo. Carlo ? Ben oui, le mari de Carla. Bling bling notre Président. Plus people qu'homme politique. Il les fait marrer et quand on dit qu'on est Français, le premier mot qu'ils nous sortent c'est « Sarkozy, Monsieur Carlo » et ils se marrent ! Moqueurs les Grecs ? Sans doute, mais il y a toujours un fonds de vérité dans cet humour bon enfant...
L'étape était donc assez courte, mais il y a eu quelques incidents techniques. Un, surtout, la Triumph des Monteil. Elle s'est faite légèrement raccourcir par un autochtone qui n'a pas ralenti assez vite. Pas trop grave, de la tôle froissée, et un redressage au treuil pour qu'elle puisse poursuivre la route. Elle conservera juste quelques traces de son passage en Grèce. Avec, en prime, une efficacité maximale des autorités. Ici, il faut établir un constat avec la Police. Ca se fait très vite. Elle est prévenue immédiatement et intervient tout aussi vite. Et quand il y a un étranger impliqué, on appelle immédiatement le Chef qui parle anglais. Comme le Grec qui avait oublié de freiner parlait également anglais, ça s'est fini rapidement chez son assureur. Problème déjà réglé ! Et après, on dit qu'en France on est efficace. Laissez-moi rire, ici on règle les problèmes dans l'heure. Nous avons des leçons à prendre.
Autre petit souci : la Kadett des Grisi. Un roulement AVG qui grognait. Juste un petit resserrage et c'est reparti. Idem pour l'embrayage de la Caravelle des Balavoine. A propos d'embrayage, la 4CV est repartie ce matin avec un câble bricolé maison, avec serre-câble réalisé avec un écrou percé et une vis, la chape ayant été renforcée par un cordon de soudure, le tout guidé par une nouveau support maison. Ce soir, Marie et Hélène ont retrouvé lesourire. Elles ont retrouvé toutes leurs vitesses et une quatre pattes en pleine santé. On n'en dira pas autant de la Chrysler New Yorker de Philippe Marraud qui semble avoir perdu deux de ses huit cylindres. Les médecins sont à son chevet, les avis sont partagés. Mais on ne doute pas de l'efficacité de l'assistance. Demain, elle va avoir retrouvé tout son allant.
Le gros des conservations a, en fait, porté sur le repas de midi. Certains, comme nous, se sont un peu faits avoir, en payant un peu cher (mais c'était tellement bon, et le serveur était tellement drôle que ce n'est pas bien grave), mais pour la grande majorité, ça a été une grande découverte que la gentillesse des Grecs. Le groupe de Blanche-Neige (ceux qui suivent la P1800 ES des Privat) a ainsi dégotté une auberge fermée mais qui a miraculeusement réouvert pour leur mitonner une salade grecque et des côtelettes d'agneau dont ils se souviendront jusqu'à la 32e génération. D'autant qu'ils ont payé moins de 7 euros par personne. Le groupe des Bourgeois a fait encore plus fort. Ils se sont retrouvés dans une petite taverne qui ne payait pas de mine. Ils ont hésité, mais ont fini par y rentrer et lorsque la propriétaire s'est aperçue qu'ils étaient Français, ils ont dû accepter le verre de l'amitié (de l'Ouzo bien sûr), avant de déguster des plats, agrémentés d'un petit blanc local, entrecoupés de trous hellènes (de l'Ouzo bien sûr). Et quand le fils est arrivé, il a absolument tenu à travailler son français, à force d'Ouzo, bien sûr... Heureusement qu'il y avait un enterrement (un gars du village, 92 ans passés et qui avait manifestement fait du bien autour de lui pour que tous se précipitent pour l'accompagner dans sa dernière demeure), sans quoi nous les attendrions encore les Bourgeois and co. L'hospitalité grecque que nous avons tant vantée, beaucoup viennent de la goûter pour la première fois. Finis les piques-niques pour eux, c'est désormais rencontre obligatoire avec la population. Vous reprendrez bien un Ouzo ?