Etape 10 - Zabljak / Cetinje
10ème jour. Tous les participants m'ont proposé de prendre ma place pour rédiger le compte-rendu de la journée. On appelle ça de la miséricorde, ou de la moquerie, c'est selon. La cause de cet engouement soudain ? Un coulage de bielles sur Titine, ma pauvre P60, victime pour la deuxième fois en trois ans de cette terrible maladie qui semble vouloir frapper les Simca dont le moteur a été refait. Les symptômes ne trompaient pas, je commence à avoir une longue habitude et la dépose des chapeaux de bielles a confirmé la première impression. La voiture terminera donc sur plateau, troisième victime d'un rallye décidément bien meurtrier pour nos mécaniques. Le chat noir est de retour !
La journée a d'ailleurs été riche en péripéties. La Giulietta de Didier Goyard et Chantal Ydée a pris son capot sur le pare-brise ! Comment est-ce possible ? L'explication est simple : sa voiture chauffait, alors il avait décidé de ne fermer le capot qu'au premier cran pour aérer un peu mieux le compartiment moteur. Il avait « sécurisé » la fermeture avec une sangle et tout avait bien fonctionné jusqu'à ce qu'il passe dans un tunnel. Là , un camion l'a croisé et l'appel d'air a été tel que la sangle a lâché et que le capot s'est carrément jeté sur le pare-brise. Didier a eu la peur de sa vie et juste le temps de s'arrêter sur le bord de la route. Heureusement, le pare-brise est encore utilisable. Et le capot tiendra provisoirement avec du scotch.
Sur le parking, ça mécaniquait beaucoup mais rien de bien grave, les habituels réglages, contrôles des niveaux et autres babioles du soir. Sous le regard de collectionneurs locaux, admiratifs du périple que nous effectuons et avec qui nous avons d'ores et déjà organisé une réunion près de Niksic lors de l'édition du mois d'octobre.
Le programme de la journée avait été allégé pour éviter que les mécaniques souffrent, compte tenu du relief accidenté, de longues montées avec des pourcentages de 7 à 8% qui pénalisent les petits moteurs. Et, sur la première partie, entre Zabljak et Niksic, un revêtement fait de trous et de rapiéçages divers, et du goudron juste pour une voiture. Il faut parfois se jeter sur le côté lorsqu'on croise un autochtone dans un 4x4 ultra-moderne ou dans une Yugo sans âge. Mais ça grimpe, et ça descend au milieu de paysages fantastiques et d'une grande variété. Avec toujours des vaches baguenaudant, pas du tout terrorisées par les autos qui les croisent ou les doublent. Et des habitants de villages isolés qui nous saluent et viennent nous voir lorsque nous nous arrêtons pour une pause café ou pour faire reposer nos mécaniques.
A midi, la plupart des participants ont fait halte au monastère d'Ostrog, juste après Niksic. Un haut lieu de pèlerinage qui se mérite. A pied pour les pénitents (11 km de montée, pieds nus) ou en voiture pour les touristes. Avec des passages très délicats et des croisements peu évidents. Le monastère est taillé dans la roche et il se visite en partie, dans un silence religieux. A mi-pente, on y pratique des baptêmes orthodoxes comme on a pu le voir. En bas, par contre, c'est ripaille païenne. Nous avions indiqué la meilleure adresse du Monténégro ou presque, un petit restaurant tout en bois qui ne paye pas de mine, le Koliba, un restaurant de spécialités nationales. On y déguste notamment le Kotage, un plat énorme composé de plusieurs viandes (veau, poulet pané, veau farci au fromage, fromage pané, jambon fumé, pommes de terre et tomate). La carte annonce que c'est un plat pour deux personnes. A quatre, on a du mal à le finir ! Pour un prix dérisoire (17 euros pour deux !). D'autres participants ont déniché un petit restaurant au bord d'une rivière et y ont dégusté, pour 8 euros, boisson et café compris, de délicieuses truites grillées pêchées devant eux.
Après de telles agapes, les 68 km restant étaient évidemment longs et il fallait faire des haltes répétées pour éviter l'endormissement. L'occasion de discuter, encore et toujours, avec une population décidément épatée par ces vieilles autos. Nous avons ainsi rencontré deux mécanos qui sont sortis en courant de ce qu'on pourrait appeler un garage pour voir de plus près le moteur de l'Alpine A 310 de Pierre Riberolles et y aller de leurs commentaires sur les ratatouillages qui ont continué, mais sont désormais bien atténués. Aux dernières nouvelles, et après avoir tout revu de fond en comble, allumage et carburation (l'un des deux carbus pissait bizarrement l'essence), ça va de mieux en mieux. Et demain, elle devrait péter le feu..
Moins sérieusement, le camembert de l'amitié a beaucoup voyagé aujourd'hui. Au petit matin, il avait atterri dans la voiture de Hubert de Gail. Mais il s'en est aperçu avant le départ et l'a glissé dans une autre auto, laquelle l'a au plus vite caché dans la TR4 d'Hugues Pulings. Où sera-t-il demain ? Pas dans la P60, c'est la seule chose qui soit sûre à l'heure qu'il est...