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Etape 03 - Ankara / Nevsehir

RAS ! Pas même une panouille à se mettre sous la plume. A ce rythme, je vais finir par dépérir, et vous aussi, car je n'aurai plus rien à vous raconter. Bien sûr, je peux toujours broder autour du temps, 30 °C en moyenne sur la journée, un soleil magnifique, deux ou trois nuages juste pour habiller le ciel qui paraîtrait, autrement, trop immaculé. Je n'insiste pas, ça va vous énerver, car il semble que vous ayez un temps pourri en France tandis que nous nous dorons la pilule. A cette heure-ci, il y en a d'ailleurs quelques-uns qui piquent une tête dans la piscine, c'est vous dire. Je pourrais vous dire que, lorsque Michel Mounier s'est arrêté au bord de la route, nous avons eu un instant l'espoir d'une vraie panne. Mais c'était juste son échappement qui ne tenait plus qu'à un fil, qu'il a retendu aussi vite que j'ai sorti mon appareil photo.

Je pourrais vous parler du marché de Kaman, coloré, vivant où l'on achète des fruits frais non traités (pas besoin du label bio, ici on cultive naturellement, sans ces saletés de produits chimiques ni ces graines traitées qui sont stériles, juste pour enrichir les labos qu'il faudra bien songer à taxer aussi fort qu'ils nous prennent pour des imbéciles), des légumes qui ont du goût (ah les tomates que l'on croque à pleine bouche !), mais également des yoyes comme nous disons, des bricoles utiles à 1 lire, par exemple, une collection d'assiettes en plastique. Je pourrais vous faire saliver en vous parlant des petits restaurants où l'on déguste des côtelettes sublimes pour trois fois rien (nous, pas de chance, nous étions tellement pressés que nous avons fini dans un fast-food, très sympa, très couleur locale, mais sans grillade). J'aurais pu vous évoquer les paysages changeant toute la journée, les routes vallonnées entre les champs de blé qui commencent à sortir de terre, les lacs à la couleur bleu laiteux, l'entrée en Cappadoce et le choc visuel que l'on prend dès le premier champignon surgi de terre, érodé comme à Brass Canyon aux Etats-Unis, les troglodytes qui surgissent au détour d'un virage. J'aurais pu vous parler de l'accueil, toujours aussi chaleureux, qui nous cueille à chaque seconde d'une émotion de plus en plus forte à mesure que les jours passent, car on ne s'habitue pas à cette humanité-là, généreuse, partageuse, débarrassée de toute arrière-pensée mercantile, politique, basse, mesquine. Bien sûr, dans les hôtels qui nous accueillent depuis deux jours (Safranbolu restera à jamais une exception, tellement l'accueil fut fort), on commence à sentir une pointe de froideur, de distance. Mais une pointe, car sous le vernis qui semble imposé au personnel, on devine la culture du partage qui finit toujours par l'emporter.

Vous l'aurez compris, j'aurais pu vous parler longuement, mais la journée a été tellement tranquille, paisible, et le lieu dans lequel nous sommes est si magique que les mots ne suffisent plus à exprimer la sérénité qui, peu à peu, envahit le convoi. Comme si nous voulions que le temps s'arrête ou qu'à tout le moins il tourne moins vite pour profiter encore et encore de cette chaleur qui nous entoure. Bay bay...


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