Jour 01-02 : Bateau
Mer d'huile. Ca change. La dernière fois, nous avions eu droit aux montagnes russes. En pleine Méditerranée, ça la fout mal. Se prenaient pour des mongols montés sur des potioks pyrénéens nos pauvres participants, le sac poubelle sous la bouche, en apnée totale, pâles comme des Mormons un jour de pleine lune. Tout le monde avait donc pris ses précautions. Pastilles scotchées derrière l'oreille, triple dose de Coculine avec un ou deux cachets de Mercalme pour faire bonne mesure. Les plus inquiets cachaient leur peur derrière un vague sourire de façade, serrant déjà les fesses en faisant monter à bord leur monture. Et puis,... rien. Pas même une vaguelette pour faire tanguer une bille de billard. Que couic ! Sont presque déçus, les bougres. Fatigués, parce que les médocs ça endort un max et qu'il fait chaud dans les cabines (la clim est économisée, ça doit coûter cher, alors sur les trois groupes électrogènes, un seul fonctionne et la moitié des clims sont déconnectées !). Pinçant malgré tout le nez parce qu'un bon nombre a eu droit à la cale, ou presque. On appelle ça du grand n'importe quoi. On réserve six mois à l'avance des cabines avec douche, propres et tout et tout, on paye le prix et zou, comme certains passagers payent un zeste plus chers que nous, vu qu'ils ne sont pas en groupes, on leur file les meilleures cabines et on se retrouve avec... ben des trucs qui sentent l'urine, le moisi, le désodirisant pourri, sans hubots, des cercueils voguant... On a pu en faire changer quelques-unes, mais pas toutes. Bon, c'est aussi ça l'aventure, mais c'était la première fois que nous prenions cette compagnie, on remarque qu'elle est aussi douée que l'autre...
Pour le reste, pas de souci. L'ambiance est au top. Rythmée par les longues attentes pour se faire tamponner le passeport (1h30 en moyenne), puis le papier pour la voiture (1h30 de plus). Tout ça pour rien, parce qu'on sait très bien devoir tout recommencer de zéro demain, sur le port. Mais c'est habituel, on prend son mal en patience et ça permet de faire passer le temps plus vite. On oublie également les petits bobos, tous réparés avant de monter sur le bateau (tiens, au fait, Martial Latruffe aurait aussi bien fait de venir avec une Panhard, il aurait au moins évité une panne : il a pété une durit de chauffage sur sa 404 ! juste sur le port. Mais comme il est prévoyant, il en avait une de rechange). Les deux 4 L en délicatesse avec leur boîte sont réparées. Dans la bataille, les Poulain ont perdu quelques chevaux, euh, pardon, deux roues motrices.Avec deux, de toutes façons, c'est mieux que zéro, pas vrai ? Les Bour continuent de faire joujou avec leurs pneumatiques (au fait, ce n'est pas un coupé 504 qu'a le fils de bonne famille, mais un Range Rover). En fait, il roule trop vite le Julien. C'est pas fait pour ça, mon gars et on va te surveiller sur la piste...
Bref, la croisière suit son petit bonhomme de chemin, escortée par quelques dauphins et la tension monte gentiment. Les GPS se chargent, les expériences du passé s'échangent entre anciens quasi blasés et nouveaux inquiets. Les premiers ont tendance à enjoliver un peu le tableau, voire à le dramatiser. Les seconds écoutent bouche bée les récits d'exploits restés dans toutes les mémoires mais qui ont parfois pris une ampleur qu'on n'avait pas tout à fait perçue comme ça à l'époque. Ils espèrent pouvoir en faire autant dans le futur, mais on les sent de plus en plus stressés à mesure que nous nous rapprochons de Tanger. Demain, nous débarquons. La patience il faudra apprendre une fois de plus pour passer police et douanes. Après, inch Allah... Le vrai départ...